mardi 24 novembre 2009

Quelque chose d'étrange se passe en Allemagne, par Karl Pfeifer

"M'accuser d'avoir participé à un "massacre" relève d'un transfert cultivé dans de nombreux cercles allemands. L'exemple le plus connu et de loin le plus largement répandu du transfert de culpabilité allemande est la diffamation d'Israël comme étant "l'Etat nazi d'aujourd'hui". C'est l'une des formes les plus contestables de l'antisémitisme d'après Auschwitz." (Karl Pfeifer)

Source: traduction d'un texte de Karl Pfeifer repris du site Harry's Place (Strange Days in Germany) via Ben Cohen de Z-Word

"J'ai 81 ans et je suis un rescapé de l'Holocauste. Quelque chose d'étrange m'est arrivée la semaine dernière en Allemage. J'étais invité par Antifa AG, une association antifaciste, attachée à 'Université de Bielefeld, à donner le 19 novembre une conférence sur l'antisémitisme en Hongrie.

La conférence devait avoir lieu au Centre autonome pour jeunes (AJZ) de Bielefeld et les organisateurs avaient annoncé l'événement trois semaines à l'avance. Deux jours avant la date de la conférence certains à l'AJZ émirent leur véto à ma conférence alléguant que mon unité militaire (j'étais à l'époque volontaire dans le Palmach, deuxième et neuvième bataillons) avait commis un massacre dans un village palestinien auquel j'avais moi-même pris part. Mes accusateurs n'ont pas nommé le lieu où le supposé massacre avait été commis et ont admis que leur information n'était pas fiable. Mais on a pu entendre l'accusation : "Il est un sioniste…".

De plus, ceux qui s'opposaient à ma conférence - vraisemblablement âgés de 30 à 40 ans - indiquèrent que les membres de Septembre noir n'étant pas admis dans les locaux de l'AJZ il était logique d'interdire ma conférence. Ils ont demandé que je me distancie par rapport au supposé massacre non spécifié.

Bien entendu aucune des personnes à l'origine de mon exclusion n'a pris la peine de me contacter. Et ces lâches n'ont pas répondu aux questions que des journalistes allemands leur ont posées sur les raisons de celle-ci.

Mes hôtes trouvèrent ailleurs une salle où 50 étudiants allemands vinrent assister à ma conférence. Le récit de mon bannissement les indigna.

J'ai déjà été accusé une fois, sans la moindre preuve, d'avoir provoqué le suicide d'un professeur qui avait enseigné à la Bielefeld Fachhochschule.
Lire la suite ICI (en anglais)

Jean-Yves Camus avait évoqué cette affaire dans L'Arche N° 598 (mars 2008) : La "victoire" de Karl Pfeifer

1 commentaire :

Gilles-Michel DEHARBE a dit…

Hitler a-il été produit par son époque ou l'a-t-il façonnée ? Dans un premier temps, les Allemands ont voulu expulser Hitler de la mémoire collective. " Cet homme n'était pas de notre race ", écrit Friedrich Meinecke, le nazisme n'étant que l'expression de sa "conception du monde", le produit de sa "volonté de puissance" et l'avatar de sa "démonie". Par opposition à tous ceux qui invoquent le poids de l'héritage, Gerhard Ritter conteste, dans L'Europe et la question allemande (1948), que l'on puisse faire de Hitler l'héritier de Frédéric II et de Bismarck. Le IIIe Reich ne peut s'expliquer ni par la conception luthérienne de l'obéissance ni par le militarisme prussien mais par "la volonté d'un seul homme dément". Frédéric II et Bismarck n'ont pas prôné la guerre totale et, ni la Reichswehr, ni les conservateurs ne sont responsables de l'arrivée de Hitler au pouvoir et du déclenchement de la guerre. Tout juste veut-il bien reconnaître qu'ils aient fait preuve de "naïveté politique" ! Quant à l'hitlérisme, c'est le populisme de l'ère des masses inspiré par le darwinisme anglais et provoqué par le nationalisme français. Il ne serait ni le produit de l'histoire allemande, ni de la société allemande, mais un phénomène entièrement neuf provoqué par le traumatisme de la défaite et du diktat de Versailles.

En revanche, Ian Kershaw fait un large usage de sources nouvelles, en particulier le journal de Gœbbels retrouvé dans les archives soviétiques, et apporte un éclairage neuf sur certains points de détail concernant sa biographie
mais c'est surtout, comme il le dit lui-même, une histoire de l'ère nazie (I, p. 34), du pouvoir du Führer. Car, pour lui, Hitler est le produit d'un amalgame, un homme et un mythe. Il a été en partie fabriqué par la société allemande. Le "charisme" d'Hitler est moins dans sa personnalité que dans le regard que des millions d'hommes ont porté sur lui . Le Führer devient la source de toute légitimité, l'instance de justification et de sanction et toutes les instances politiques gravitent autour de lui selon des règles "féodales", étrangères à toute rationalité politique. D'où cet exceptionnel dynamisme, mais aussi cette anarchie auto-destructrice. S'il est évident que Hitler seul n'eût pas été possible, Ian Kershaw affirme qu'une Allemagne sans lui aurait eu un tout autre visage. L'histoire sans Hitler n'eût pas été radicalement autre, mais résolument différente. On comprend à la lecture de l'ouvrage que sans le nazisme et son chef, l'Allemagne weimarienne se serait de toute façon sabordée pour accoucher d'une dictature d'un autre type, un régime autoritaire conservateur fondé sur le pouvoir militaire, une Allemagne aux dimensions idéologiques de la Prusse.

* Ian KERSHAW, Qu'est ce que le nazisme ? Problème et perspectives d'interprétations, "Folio", Gallimard, Paris, 1992.

* Ian KERSHAW, Hitler, Essai sur le charisme en politique,
Gallimard, Paris, 1995.

- Pour info : Une nouvelle victoire pour les rescapés de la Shoah.

http://www.actu.co.il/2009/11/une-nouvelle-victoire-pour-les-rescapes-de-la-shoah/